CONSEIL GENERAL DES PYRENEES-ORIENTALES
SEANCE PLENIERE 15 décembre 2014
INTERVENTION DU GROUPE FRONT DE GAUCHE
Débat d’Orientations Budgétaires 2015
Madame la Présidente,
Chers collègues,
Depuis plusieurs exercices, l’évolution des recettes du Département ne suit pas le rythme de la croissance des dépenses contraintes.
Je cite votre rapport, pour l'année 2015, « l'impasse budgétaire consiste à compenser un peu plus de 5 M€ de nouvelles dépenses avec 14 M€ de recettes supprimées ».
C'est ce que l'on appelle « l'effet ciseau ».
Difficile dans ces conditions de s'enthousiasmer.
Commençons par les recettes et disons-le d’emblée : priver les collectivités de leurs ressources est un choix idéologique.
Ce choix était d’ailleurs celui de la droite jusqu’en 2012.
Ainsi, pendant une décennie, les gouvernements UMP successifs se sont acharnés contre les collectivités, faisant d’elles des cibles prioritaires alors qu’elles incarnent le dernier rempart des Français face à la démolition sociale de la déferlante ultra-libérale.
La droite a soumis les collectivités à un assèchement méthodique de leurs finances.
Mesure emblématique s’il en est, et lourde de conséquences pour les départements : la suppression de la Taxe Professionnelle, décidée par Nicolas Sarkozy et ses amis.
La casse des finances locales par la droite, c’est aussi l’introduction du gel des dotations de l’État, que nous étions nombreux à dénoncer dans l’hémicycle à une époque pas si lointaine.
Un palier a été franchi depuis, mais pas dans le sens attendu, puisque chaque nouvelle loi de finances apporte désormais son lot de réduction drastique des dotations aux collectivités.
Nous sommes en fin d’année 2014 et cette logique d’asphyxie financière des départements n’a toujours pas subi de coup d’arrêt, malgré l’élection d’un Président de la République qui devait mener une politique de gauche.
Ainsi, pour 2015, le DOB annonce une diminution de 7 M€ de la DGF, rien que pour les Pyrénées-Orientales.
Déjà en 2014, notre DGF avait subi une baisse de 3 M€.
En deux ans, ce seront déjà 10 M€ qui seront perdus.
Qu'en sera-t-il en 2016 et en 2017 ?
Ces diminutions de la DGF ne s'inscrivent pas dans un plan d'économie de l'Etat sur 3 ans, mais bien dans un plan d'austérité de 50 Mds € qui ne dit pas son nom imposé par Bruxelles.
Les orientations politiques nationales actuelles, au diapason de celles de l’Union européenne, ne jurent que par l’austérité !
Les plans d’économies sur les dépenses publiques, parmi lesquels la baisse des dotations aux collectivités et ses répercussions en cascade, ne serviront qu’à financer les cadeaux faits au patronat, comme le Crédit d’Impôt Compétitivité Emploi, sans aucune contrepartie assurée en termes de créations d’emplois !
L’État soutient donc de moins en moins un Département comme le nôtre, alors que la détresse sociale gagne chaque jour du terrain.
Est-ce cela que nos concitoyens sont en droit d’attendre d’un Gouvernement qui s’autoproclame de gauche ?
Le taux de chômage dans les PO atteint 14,6 %.
Le taux de pauvreté, 20,4 %.
24 638 personnes sont allocataires du RSA.
Ces chiffres sont d’une violence insoutenable, d’abord pour le nombre de personnes concernées.
Nous voyons aussi que l’état du budget insertion de notre collectivité est le reflet direct du marasme économique actuel.
Pourtant, les compensations financières de l’État au Département, elles, ne progressent que faiblement.
Ce décrochage entre les dépenses obligatoires que le Département assure au nom de la solidarité nationale et les compensations versées par l’État est inadmissible.
Notre Groupe a toujours dénoncé publiquement et avec force la dette de l’État envers les Départements, qui se creuse chaque année un peu plus.
Cette dette atteint aujourd’hui 48 Mds € depuis les transferts massifs de charges commencés par la droite en 2002.
Nous rappelons que lors du DOB 2013, alors que 150 M€ manquaient à l'appel pour notre département, nous vous avions proposé ici même une motion demandant à l’État le remboursement de cette dette sur 5 ans.
Motion qui, hélas, n'avait même pas été débattue...
Nous demandions la même chose à l'occasion du DOB 2014. Là, encore, nous n'avions pas été écoutés.
150 M€ en 2012, combien l’État doit à notre Département aujourd'hui en 2014 ?
L’Assemblée des Départements de France estime cette absence de compensation, cette année, à 8 Mds € pour l'ensemble des départements.
Qui peut prétendre que la réduction de ces ressources n’a pas d’incidence sur le niveau des interventions du Conseil Général ?
Vous-même, Madame la Présidente, il y a un mois lors de l'étude de notre Pacte Territorial pour l'Insertion, vous déclariez que l'absence de solidarité coûterait bien plus cher que ce qu'elle coûte actuellement.
Oui, Madame la Présidente, à réduire les ressources des collectivités en charge des solidarités, un jour, la société le paiera très très cher !
Avec ces transferts de charges et ce plan d'austérité, les collectivités sont victimes d’un étranglement budgétaire sans précédent, qui les oblige à réduire la voilure sur les investissements et à économiser sur les Services publics.
Notre Groupe n’accepte pas cette situation.
Il n’est plus tenable pour notre Assemblée de constater à chaque débat budgétaire l’ampleur de la catastrophe et de ne pas bouger collectivement pour faire évoluer les choses.
Il y a des responsabilités nationales à pointer.
Le document du DOB se contente de requalifier la cure d'austérité imposé par l’État en « recalibrage sans précédent de ressources financières » ou encore en « ajustements budgétaires jamais accomplis », sans rien revendiquer de plus.
Combien de temps encore faudra-t-il attendre pour qu’émergent de véritables exigences en matière de finances locales et de répartition des richesses entre les territoires ?
Quand refuserons-nous tous ensemble de simples mesures palliatives, destinées à mettre des rustines sur un budget pour qu’il tienne jusqu’au prochain exercice ?
Redisons-le fermement au Gouvernement comme à leurs représentants dans le département qui ont voté le Projet de Loi de Finances 2015 : s’attaquer aux collectivités, c’est paralyser l’économie.
Mais soutenir les collectivités, c’est faire le choix de la sortie de crise pour tout le pays.
Relancer la croissance dans le pays passe par une relance de la consommation et par une relance de l’investissement public.
Les collectivités représentent moins de 10 % de la dette de la France, alors qu’elles assurent 73 % des investissements publics du pays.
Elles sont les meilleurs alliées du Gouvernement pour travailler à la sortie de crise.
Voilà plus de 2 ans que s'est exprimée majoritairement une volonté de changement de cap avec l'adhésion au slogan « Le changem
ent, c’est maintenant ».
Pourtant, la population est toujours dans l’attente d’une inversion de la courbe du chômage, d’un retour de la croissance, d’une hausse du pouvoir d’achat.
Et de plus en plus de collectivités se retrouvent prises à la gorge au moment où elles devraient pouvoir renforcer leur action.
C’est parce que la situation est d’une gravité extrême qu’il faut y répondre par des mesures urgentes et d’une ampleur exceptionnelle.
Il faut aujourd’hui changer de braquet dans les revendications portées par notre Assemblée.
Réclamer des moyens de l’État et une véritable politique de gauche est une bataille dans laquelle le Groupe Front de Gauche est prêt à lancer toutes ses forces et à laquelle il appelle le Groupe Socialiste et apparentés à se joindre.
Jean-Louis Alvarez
Président du Groupe Front de Gauche 66